Frappée de plein fouet par la crise sanitaire et subissant violemment le contrecoup de la réduction drastique des budgets de formation alloués par les Entreprises au développement de leurs collaboratrices et collaborateurs, les acteurs de la formation sont au défi de leur propre survie.
Comme pour bien d’autres secteurs, la crise n’a pas épargné celui de la Formation. Il ne souffrirait pas d’exception. Il devrait aussi connaitre de brutales secousses et des changements en profondeur.
Il ne faut pas s’y tromper. Les temps sont durs, très durs. Certains acteurs parlent d’une baisse d’activité de 70 à 80% par rapport à une période normale. Et pour les grands donneurs d’ordre, l’heure serait plutôt à la pause de l’exécution des programmes et à l’optimisation des budgets consentis. L’activité de la formation serait incontestablement en berne.
Ceux qui passeront l’orage – les survivants – seront challengés sur d’impératives transformations à opérer.
Il en ira, ainsi et tout d’abord, d’une recomposition des capacités d’offres de formation. Il y aura évidemment ceux qui feront le dos rond et, à terme, rebondiront à la faveur de la reprise économique car s’appuyant sur des structures plus larges intéressées à toutes les dimensions du capital humain et en mesure d’opérer des arbitrages momentanés de redéploiement de leurs ressources. Mais il y aura, aussi et surtout, d’autres intervenants moins chanceux et dont l’activité reposait sur quelques marchés captifs aujourd’hui évaporés. Il en est encore d’autres trop peu armées financièrement ou humainement pour résister aux affres de la crise. D’ailleurs, aux premières heures de celle-ci, ils en étaient déjà à compter les rares ressources qu’ils pouvaient encore mobiliser et à « décompter » une trésorerie en voie d’assèchement. Comment pourraient-ils investir et préparer l’avenir ? Bien difficile à dire. Il y a, enfin, ceux qui tablaient et continueront à tabler sur leurs offres de niche espérant que leur spécificité et l’originalité de leurs prestations soient reconnues. Pari bien difficile et audacieux à l’heure où les entreprises coupent les robinets de la formation !
Terribles déconvenues dès lors pour bien des compétences qui toutes pourtant – conviction chevillée au corps- ne pourront espérer dans un avenir proche (re)conduire leurs projets d’accompagnement et de formation auxquels ils aspiraient apporter une valeur ajoutée certaine à l’endroit de ces mêmes entreprises. L’association des Bureaux de Conseil et de Formation (ABCF) tire à juste titre la sonnette d’alarme en soulignant l’urgence d’aider à assurer la continuité d’activité de nombre de cabinets en difficulté sinon en détresse.
Disparition programmée ?
La crise aura agi à l’instar d’une violente déflagration difficilement soutenable et vécue pour les plus résistants comme une lente agonie. C’est en tout cas ce que pourrait laisser supposer la lecture des événements.
Mais d’aucuns diront qu’in fine, le marché aura rectifié au « bénéfice » de cette crise, ses propres dérives qu’une lente dépréciation de la qualité de l’offre avait entraînées. La crise n’apparaissant que comme un facteur accélérateur d’une mutation qui n’avait que trop tardé à se manifester. Il y a -peut-être- là une part de vérité.
En conséquence le marché manquerait de maturité. Partant de ce constat, les changements attendus seraient de quatre ordres.
Il y aura probablement une tendance forte à la restructuration du marché qui profitera à quelques grosses structures ayant pu résister au choc de la crise mais plus surement à quelques autres acteurs agiles et innovants jouant d’abord sur la spécificité de leurs offres et/ou s’appuyant sur l’expertise reconnue de leurs intervenants. Il faudra également compter sur le niveau d’exigences qu’imposeront les donneurs d’ordre quant à la co-construction d’offres de qualité adaptées aux besoins réels des entreprises. Il y a là une exigence essentielle dont les entreprises devront faire cas et prendre toute la mesure en fixant les critères requis visant à assurer dans les meilleures conditions, l’exécution des formations souhaitées. Il en sera de la sorte appelé à une véritable professionnalisation de la formation. Il y aura, enfin, à prendre le virage de la digitalisation et maintenir le cap. Vaste sujet au demeurant !
C’est donc un peu désormais une course contre la montre qui s’engage. Sous les effets de la crise sanitaire, elle conduira à rebattre les cartes de la formation. Dans un contexte ou le développement des entreprises devraient passer par le renforcement des compétences et l’amélioration de l’employabilité, il faudra justement éviter de prendre ce chemin à rebours.
Karim AMARA