Les compétences numériques seront parmi les plus recherchées dans les prochaines années. C’est là une évidence que l’on ne peut que difficilement contester.
La révolution technologique est en marche et va de facto bousculer tous nos repères. Plus conséquemment, l’arrivée de l’Intelligence Artificielle et les ruptures qu’elle engendrera dans les domaines de la gestion des données et de la prise de décision, va tout autant agir dans le sens de cette transformation radicale des activités et des métiers.

Remédier au gap de compétences numériques

Or, le gap en compétences numériques est patent. Un chiffre résume cela. Nous le tenons de la Commission Européenne. 70% des entreprises européennes déclarent manquer de personnel possédant les compétences numériques adéquates. 

En Europe toujours, plus de 90 % des rôles professionnels exigent désormais un niveau de base de connaissances numériques. L’utilisation du numérique se répand dans tous les secteurs, des transports à l’agriculture. Or, environ 42 % des Européens n’ont pas de compétences numériques de base. Une autre donnée illustre nos propos : L’indice relatif à l’économie et à la société numériques montre que quatre adultes sur dix travaillant en Europe ne disposent pas des compétences numériques de base. 

Favoriser toutes les initiatives pour ne pas rater le train de la digitalisation

Que dire du Maroc ?  Référons-nous au très complet Digital Talent Review produit par le Groupe Huawei et intitulé « Réduire l’écart entre les compétences numériques et le marché du travail : pourquoi le Maroc ne peut y échapper ? ». 

Les données sont sans équivoque. Selon ledit rapport produit en 2021 « plus de 85% des responsables des ressources humaines indiquent que les besoins en matière de profils et talents TIC vont augmenter au cours des cinq prochaines années.  Autre observation mise en avant « 70% des recruteurs de profils TIC ont des difficultés à trouver aussi bien des talents particulièrement expérimentés que des cadres moyens ».

C’est bien à une véritable révolution des processus éducatifs et de formation à laquelle il faudra engager. Comme le rappelait l’Agence du Développement du Digital (A.D.D.) dans sa note d’orientation publiée en 2020, il y aurait malgré les nombreuses initiatives déjà conduites pour engager la trajectoire du Digital au Maroc à « remédier au manque de profils spécialisés dans le digital, à renforcer les usages et la culture digital et à se doter d’un plan national de formation en mesure de relever le défi du capital humain ».

Le chantier est immense. 

Engager les entreprises et les DRH dans cette urgente mise à niveau 

De l’école à l’entreprise en passant par les universités et les organismes de la formation professionnelle, les efforts à conduire seront énormes et appelleront à une promotion systématique des compétences numériques. Il en sera assurément de même pour nos entreprises.

Mais en quoi pourrait se décomposer les domaines cibles pour les entreprises et leurs Directions des Ressources humaines pour réussir ce tournant. Vers où possiblement devraient-t-elles orienter leurs actions ?

• De prime abord, les Directions des Ressources Humaines seront mises (elles le sont déjà) au défi de l’attractivité des compétences numériques pour accompagner la révolution digitale. Attirer et conserver les talents du numérique alors même que le Maroc fait face à une fuite de ses « cerveaux numériques » est un énorme enjeu. Il faut dire que la créativité, l’innovation et par là-même le renforcement des niveaux de la compétitivité des entreprises en seront tributaires.
• Ensuite, il y a celui de la formation en fil continu des compétences numériques. Il faut faire face à l’obsolescence de ces dernières, au maintien de la qualité voire au développement de ces mêmes compétences au sein des entreprises. La question de la formation sera éminemment capitale. Comment s’organisera-t-elle ? Comment travailler à la rendre efficace ? Quels budgets y consacrer ? Quelle en serait la soutenabilité financière ? Des interrogations nombreuses qu’il faudra explorer de manière vigoureuse.
• Le troisième domaine est celui de la mise à niveau des compétences numériques basiques pour les collaborateurs non nécessairement encore inscrits dans la dynamique de la digitalisation. Beaucoup de métiers y échappent encore mais ne manqueront pas à terme d’être touchés. Comment procéder ? Comment évaluer les compétences numériques ? Que viser précisément comme compétences numériques ? De nombreuses et passionnantes questions.
• Enfin, il y aura un dernier domaine à investir en termes de réflexion et de transformation : celui du Management. Il concernerait l’adaptation des modèles managériaux à cette révolution. A quoi va donner naissance une hybridation du travail ? Quels types de management faudra-t-il privilégier ?                            

 Soyons honnêtes : nous n’en savons pas grand-chose à ce jour.

Les domaines d’action sont donc multiples. Ils obligeront à des mises à niveaux de qualité mais probablement aussi à d’importantes ruptures cognitives pour réussir les adaptations nécessaires pour l’acquisition et la maîtrise desdites compétences numériques au regard des réalités nouvelles du monde du travail.

Nous ne sommes qu’au début de cette mutation.

Karim AMARA